L’historicité de Jésus de Nazareth…

L’historicité de Jésus de Nazareth…

En octobre 1993, j’étais exclu de l’École Pratique des Hautes Études (EPHE), Ve section – Sciences Religieuses, par le Prof. Pierre Géoltrain, directeur d’études (origines du Christianisme). Motif : « Se permet de remettre en question l’historicité de Jésus ».

Je fus donc contraint d’aller poursuivre mes recherches à Rome, à l’Institut Biblique et à « l’Urbaniana », avec l’un des grands spécialistes du judéo-christianisme, le Prof. Emanuele Testa (auteur de « La Fede della Chiesa Madre di Gerusalemme » – 1992).

À l’occasion de la sortie du film – très controversé – de M. Gibson, et prenant le risque de m’attirer les foudres de la « Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la Foi » (ex-Inquisition), je récidive : les Juifs n’ont pas pu faire crucifier Jésus de Nazareth par les Romains, parce qu’il n’a jamais existé !

Je rappellerai tout d’abord, à toutes fins utiles, l’une des règles fondamentales de la recherche « historique » : la charge de la preuve incombe à celui qui affirme et non à celui qui nie. En d’autres termes, je n’ai pas à prouver la non-existence de Jésus : il appartient à ceux qui voudraient nous en convaincre d’en rapporter la preuve.

D’un point de vue purement académique, c’est-à-dire faisant abstraction de toutes considérations religieuses ou théologiques, le problème de l’historicité de Jésus porte essentiellement sur des questions de critique littéraire.

Contrairement à ce que prétendent, depuis des siècles, les Églises Chrétiennes, les Évangiles, qu’ils soient « canoniques » ou « apocryphes », ne constituent nullement, du point de vue littéraire, des récits « historiques » ou des « témoignages de témoins oculaires » : il s’agit en fait d’un genre littéraire très particulier – mais aussi très courant, dans les milieux juifs (et judéo-chrétiens) des premiers siècles de notre ère : le midrash.

Ce mot signifie en hébreux : commentaire, recherche exégétique (de la racine « deresh » : chercher, fouiller), mais la meilleure traduction est probablement celle de Pierre Géoltrain qui intitula son recueil d’études sur les écrits non canoniques : « La fable apocryphe » (1990).

Les midrashim sont en effet des « fables » théologiques – par opposition aux fables « morales » de M. de La Fontaine. Ils n’avaient donc, originellement, aucune prétention historique. Il s’agit de « spéculations » sur la venue éventuelle du messie (Héb. : Mashiah – Grec : Christos), basées sur les nombreux textes vétéro-testamentaires traitant de ce thème fondamental (je dirais même, du thème le plus fondamental du judaïsme) qu’est le messianisme (dont les avatars modernes se sont appelés « communisme », « trotskisme », et aujourd’hui « alter mondialisme »).

La tâche de ces rabbins, auteurs de midrashim, était d’autant plus facilitée qu’il existait à l’époque des « florilèges messianiques », dont vingt et un fragments furent retrouvés à Qumram (cf. A. Dupont-Sommer : « Les Écrits Esséniens découverts près de la Mer Morte » – 1959).

En fait, tous les détails des paroles prononcées et des actes accomplis dans le Nouveau Testament par Jésus, ont leur source dans l’Ancien Testament ; et les auteurs des écrits attribués à Matthieu, à Marc, à Luc ou à Jean (pour les « canoniques »), mais aussi à Jacques, à Barthélémy, à André ou à Philippe (pour les « apocryphes »), se trahissent souvent en plaçant à la fin d’un épisode de ces « romans de Jésus-le-Messie », la fameuse formule : « Et impleta est scriptura » (et ainsi fut accompli ce que dit l’Écriture), suivie généralement de la citation elle-même (« testimonia »).

Il suffit donc de « chercher » et de « fouiller » (Héb. Midrash) l’Ancien Testament et l’on retrouvera, par exemple, pratiquement tous les détails de la « Passion » dans le Psaume 22 (« Ils ont percé mes mains et mes pieds », « Ils se partagent mes vêtements et tirent au sort ma tunique ») – y compris le « Eli, Eli, lama Sabachthani » de la neuvième heure ! (Mt 27 : 46)

Les trente pièces d’argent de Judas ainsi que le champ du potier proviennent de Zacharie 11:12-13.

Quant à ce qui ne se trouvait pas dans la Bible, les très prolifiques auteurs de ces midrashim n’hésitaient pas à l’inventer, afin de répondre à la curiosité de leurs lecteurs : ainsi les auteurs des Évangiles synoptiques (Matthieu, Marc et Luc) ayant omis de donner un nom à leurs « Rois Mages » (que les Évangiles appellent simplement « Mages » – Latin : Magi, Grec : Magoï), un auteur prit l’initiative de les baptiser Gaspard, Melchior et Balthasar…

Je tiens à préciser dès maintenant qu’il ne s’agissait nullement de malhonnêteté de la part des auteurs de midrashim : tout le monde, à l’époque, savait pertinemment qu’ils ne faisaient pas la relation de faits passés, mais qu’ils spéculaient sur des faits à venir.

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Comments (15)

  • Mike Joseph Répondre

    A priori, on peut tout simplement éviter de faire de la gymnastique intellectuelle autour de la question, en choisissant de dire et vivre avec ce qui nous fait du bien. Croire ou ne pas croire est une question de choix. Mais croire en Dieu et en Jésus, sur le plan humain et même spirituel, est un choix éclairé. Pour le reste: “ Vanité, vanité, vanité, tout n`est que vanité. 

    4 octobre 2010 à 19 h 47 min
  • Rebecca Répondre

    Ce que vous écrivez de la composition de la fable révélée comme de l’apocrype est certes brillantissime, mieux convaincant. Ayant bien connu Pierre Geoltrain tolérant jusqu’à des sectaires avoués en son séminaire, je m’étonne seulement qu’il vous ait renvoyé de son cours. Auriez-vous l’obligeance de conter cette fable avec plus de détails, d’ajouter à votre récit des indices de réalité. Cordialement à vous.

    11 avril 2005 à 15 h 21 min
  • Michel Louis Lévy Répondre

    Jean-Pierre Pagès-Schweitzer, vous avez raison sur toute la ligne et vos contradicteurs sont des ânes. J’ajoute que vous êtes meilleur chrétien qu’eux : Jésus savait l’hébreu, Lui! Il suffit de lire un minimum d’hébreu pour décoder les midrachim. Par exemple, le “potier”, Yotser, c’est Celui qui “façonne”, Yotser, l’Homme (Genèse 2,7). Voir à ce sujet De l’historicité de Jésus http://www.cdweb.com/mll/Textes/barreau.htm et Jésus et ses apôtres : de sacrés blagueurs ? http://www.zetetique.ldh.org/jesus_levy.html En grande fraternité Michel Louis Lévy

    27 août 2004 à 15 h 57 min
  • Jean Térémetz Répondre

    L’effarante et toute simple relation du suicide de Jésus sur sa croix par rupture d’anévrisme, n’a pu être inventée par qui que ce soit.

    3 août 2004 à 17 h 14 min
  • DarkHellion Répondre

    En dépit du Christianisme ?! Absurde, c’est l’inverse qui est bien plus proche de la vérité. Voltairien ?! Quelle belle référence que Voltaire Allez quelques citations que l’on a tendance à oublier : http://www.geocities.com/SunsetStrip/Lounge/2712 http://www.france-avenir.com/citations/voltaire.htm

    16 avril 2004 à 18 h 50 min
  • jacques furalainac Répondre

    Pour Jean-Luc “Comment se fait-il que mille ans après “l’invention” de ce Mahomet, et malgré tous les crimes et scandales commis en son nom, des milliers de personnes déclarent qu’il est leurs Seigneur et Maître, et qu’ils lui donnent leur vie afin de suivre ses “soi-disants” enseignements? Comment expliquer que ces gens vivent tous les jours les promesses faites par ce personnage sorti d’un conte inventé par des ayatollahs? Comment ces spéculations sur ce “Messie” ont-elles pu toucher le coeur et l’âme de tant de personnes. Je ne parle pas de religions ou de philosophies, ni de rites ou de surperstitions, mais d’un Esprit de Vie qui tranforme radicalement le coeur des Hommes. ” Ce texte aurait pu être écrit par Bin Laden. Lui aussi a les mêmes “élévations d’âme” lorsqu’il pris Allah ou Mahomet, son Jésus à lui. Et c’est là le problème TRES SERIEUX des religions. Si on refuse la raison et on se met à croire que la réalité se conforme à nos “transportations” du moment, si on se met à croire que “Dieu nous parle”, alors, il n’y a plus rien qui peut unir les hommes. La raison et le sens commun (a partir desquels la science a été développer) permettre à ce que des personnes très différentes arrive par raisonnement et expériences à être d’accord sur des faits. Lorsque les gens considère la vérité comme étant reçue divinement (directement “dans son coeur” ou par intermédaire (Jésus, Mahomet, Pape, Ayatollahs, etc)) alors il n’y a plus de “terrain commun”. Invariablement on en arrive à ce qu’un des “dieux” dit différemment d’un autre. Ainsi la divinité des protestants a un dogme différent de celui des catholique. Allah pense différemment de Jésus, etc. Il s’en suit une querelle du type: “mon dieu est meilleur que le tien” qu’il est impossible à résoudre pacifiquement puisque chacun doit “croire sans flêchir” sous peine d’être un apostat et de pourrir en enfer. Et c’est la guerre inévitable. Ce n’est pas un hasard que hier Bush disait dans sa conférence de presse (presque mot à mot) être inspiré par le “Allmighty” qui lui avait donné la mission planétaire de libérer la planète. On aurait cru un moment que Bin Laden le poursuivrait pour atteinte à des droits d’auteurs. L’Europe a réussi parce qu’épuisée par de longues guerres religieuses elle a finalement compris qu’il vallait mieux dire non à l’obscurantisme religieux et éloiger les religieux de la voix publique avec pour résultat le développement économique et le bien-être spectaculaire que l’on connait. Le développement de l’Europe s’est fait EN DEPIT du christianisme. Il est Voltairien.

    15 avril 2004 à 19 h 28 min
  • Didier Répondre

    -“Cette Paix intérieure, cette Joie de tous les instants, cet Amour qui permet d’aimer ses ennemis et de pardonner sans restrictions ne seraient qu’un leurre? Cette absence de craintes, d’angoisses, de peurs et ce sentiment de totale liberté et d’harmonie seraient le produit d’un pseudo Sauveur? ” dixit Jean Luc. Tout celà, c’est vrai, mais c’est dans votre tête que celà existe, que celà se produit. On peut dire que c’est du sentiment, ou bien un bienfait philisophique et moral. Et c’est une très bonne chose, loin de moi l’envie de me moquer, bien au contraire. Simplement il faut comprendre que tout ceci fait partie d’un des besoins primordiaux de l’Homme, et ce, quelque soit l’époque de sa vie. D’autres humains naitront bien après que nous leurs aurons laissé la place et tout recommencera ainsi… Faiblesse de construction de la nature humaine ou bien qualité (les deux acceptions me parraissent valables)il y aura toujours le besoin de croire, l’angoisse sourde d’être peut être seuls dans l’univers, le désir d’obéir à une puissance tutélaire; comme d’autres éprouvent le besoin “d’appartenir à”…à une grande école, un corps d’armée, une épouse, une famille de pensée…etc. Ce phénomène a été constaté chez les premiers hommes des cavernes. Moi ce texte, bien qu’un peu court, m’a intéressé, interpelé. Et si ce n’était qu’un conte ? Celà ôterait-il quelque chose au message de civilisation dont la religion est le vecteur? Pourquoi se mettre à salir cet auteur parce qu’il émet une hypothèse dérangeante ? Les croyants sont si sûr de leur “vérité”, qui n’est, au fond, qu’une intime conviction ? Leur conviction manquerait-elle tant de fondation qu’il leur faille utiliser l’anathème sur un auteur qui a, seulement, une conviction différente, et rien de plus ?

    15 avril 2004 à 17 h 11 min
  • HyPNOS Répondre

    Si je ne te vois pas et que je dis que tu n’existes pas, alors de mon point de vue, tu n’existes pas. Par conséquent je décrète à partir d’aujourd’hui que toutes le choses que je ne vois pas n’existent pas : Dieu, la guerre en irak, les fonds nécessaires pour payer ma retraite (quoique ;-) ), le déclin de la france, l’or de la BDF, etc… Pondre un article pareil sur Jésus me semble aussi inutile que de dire que mahomet n’a jamais existé. Allons raconter aux chiites irakiens et aux palestiniens lardés de bombes que leur prophète n’existe pas. Pitoyable ! Je pense qu’il y a des débats plus urgents que la remise en cause des prophètes de telle ou telle religion.

    15 avril 2004 à 13 h 55 min
  • Français Répondre

    Je suis un peu étonné de la faiblesse de cet article. Le site les4vérités que j’appréciais depuis des années me surprend de plus en plus. Ca devient carrément n’importe quoi. Est-ce qu’on peut appeller ce texte une argumentation, je ne crois pas, ça ressemble à une rédaction de collégien. Même sur les billets de Banque chinois, il est mentionné 2004, qu’est-ce qui s’est passé il y a 2004 ans ? Eh bien d’après M. Schweitzer, il ne s’est rien passé, tout ça n’est que mystification collective. Bien sûr, tous les avis sont à écouter et discuter, mais ça serait pas mal d’argumenter un peu plus. Français

    14 avril 2004 à 5 h 59 min
  • ac pintaud Répondre

    ravie de trouver des commentaires de ce type même de la part de non-croyants ! avoir foi au christ c’est renoncer à prouver son au thenticité ! et 2000 ans de mytification ! il faut oser le dire ! et nous prendre pour des c………

    13 avril 2004 à 18 h 32 min
  • anonyme Répondre

    Quel amas de sottises ! Pour l’information de notre “expert”, il n’y a pas que les textes religieux et/ou judéo-chrétiens qui parlent de Jesus mais aussi ceux d’historiens grecs et romains (Flavius Joseph, Tacite, etc) qui n’avaient aucune raison d’accréditer à tort l’existence de Jesus de Nazareth. Comme le disait hier encore sur France5 Odon Vallet, la quasi-totalité des fondateurs de religion ne sont connus que par les écrits de leurs disciples : le Bouddha, Zoroastre, Mahomet, etc, car eux-mêmes n’ont jamais rien écrit. Et Vallet d’ajouter malicieusement : “si on considère que les écrits et témoignages des disciples ne sont pas valabes pour affirmer l’existence du maître, alors je me vois dans l’obligation de vous dire qu’Aristote n’a jamais existé. Car à part les écrits de ses élèves, il n’existe aucune preuve archéologique palpable de son existence. Aucune.” On voit où mène le raisonnement par l’absurde.

    13 avril 2004 à 12 h 12 min
  • milord Répondre

    au fou! merci M geoltrain!

    12 avril 2004 à 20 h 47 min
  • Sos-Occident Répondre

    > je n’ai pas à prouver la non-existence de Jésus Et pourquoi donc ? L’explication avancée n’est absolument pas convaincante et est même consternante de par son illogisme. Vous affirmez quelque chose, c’est à vous de le prouver. La justification est nécessaire dans les 2 sens. N’étant pas croyant comme l’est vraisemblablement Jean-Luc, j’aborderai l’existence ou non de Jésus sous un autre angle. La question posée par l’auteur de l’article est sans intérêt. Il est évident qu’il y a 2000 ans à Jérusalem un juif nommé Yeshua s’est proclamé messie et s’est mis à réformer le judaïsme dans ce qui allait devenir une nouvelle religion. Certains de ces actes (miracles, résurrection) ou la véracité de ses propos peuvent être mis en doute. Moi même je n’y crois pas. Mais l’existence même de ce prophète et de son prêche ne font aucun doute.

    12 avril 2004 à 20 h 39 min
  • theodore Répondre

    mais je SAIS que Jésus a réellement existé et la “preuve” historique est le dernier de mes soucis. / dixit le texte précédent. idem, en ce qui me concerne.( d’ailleurs il parait que Abraham et Moise non pas réelement existé également…rires ! )

    12 avril 2004 à 15 h 43 min
  • Jean-Luc Répondre

    Monsieur, Vous soutenez une thèse qui ne manque pas d’intérêt et vous rappelez certains faits qui sont véridiques, mais permettez moi de vous soumettre quelques questions. Comment se fait-il que deux mille ans après “l’invention” de ce Jésus, et malgré tous les crimes et scandales commis en son nom, des milliers de personnes déclarent qu’il est leurs Seigneur et Maître, et qu’ils lui donnent leur vie afin de suivre ses “soi-disants” enseignements? Comment expliquer que ces gens vivent tous les jours les promesses faites par ce personnage sorti d’un conte inventé par des rabbins? Comment ces spéculations sur ce “Messie” ont-elles pu toucher le coeur et l’âme de tant de personnes. Je ne parle pas de religions ou de philosophies, ni de rites ou de surperstitions, mais d’un Esprit de Vie qui tranforme radicalement le coeur des Hommes. Si je peux en parler, c’est que je suis de ceux-là pour mon plus grand bonheur. Cette Paix intérieure, cette Joie de tous les instants, cet Amour qui permet d’aimer ses ennemis et de pardonner sans restrictions ne seraient qu’un leurre? Cette absence de craintes, d’angoisses, de peurs et ce sentiment de totale liberté et d’harmonie seraient le produit d’un pseudo Sauveur? On peut me prouver historiquement l’existence de tous les personnages que l’on veut, mais aucun ne pourra me révéler Dieu, aussi savants ou sages fussent-ils. Grâce à Jésus, j’ai compris que Dieu c’est l’Amour et que l’Amour rend libre et pleinement heureux lorsqu’on fait sa volonté. Vous pouvez penser que je suis un illuminé, un ignare naïf ou tout ce que vous voudrez, mais je SAIS que Jésus a réellement existé et la “preuve” historique est le dernier de mes soucis. Amicalement! P.S.: Je vous invite à lire, notament, la quatrième partie de l’ouvrage: “Le Livre d’Urantia”, qui peut être lu comme un conte de fée, mais qui ne manque pas d’intérêt, en particulier pour un esprit scientifique. Il se trouve gratuitement sur internet.

    12 avril 2004 à 7 h 56 min

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