Marre du médiatiquement incorrect

Marre du médiatiquement incorrect

Le citoyen qui travaille reçoit des informations lapidaires, tamisées par les présentateurs de JT ou les unes de journaux. Il est tout bonnement soumis à une désinformation sournoise mais généralisée.

La culture de l’évènementiel qui assure l’audience , objectif essentiel et concurrentiel, alimente une subjectivité congénitale, un prêt-à-penser insidieux, y compris et même surtout dans les médias publics.

Pour qui dispose d’un peu plus de temps, de curiosité et d’esprit critique, les débats ( qui supposent un « zapping » d’acrobate !) avec des experts, journalistes d’investigation, historiens ou philosophes, balisent l’information de bases de réflexion sérieuses et autorisent des jugements personnels plus fondés.

Il est un exercice audiovisuel qui se situe entre le prédigéré et les soirées tardives et roboratives. Ce sont les 10/15 minutes d’interview du matin qui se généralisent et se concurrencent dans le même créneau horaire sur les chaînes TV et radios. Elles sont conduites par des journalistes souvent peu amènes et parfois brutaux, qui s’érigent en moralisateurs ou en inquisiteurs et dont l’indépendance si véhémentement clamée se drape d’immunité journalistique rarement courtoise et souvent agressive*.

Le mode opératoire, quasi standardisé, est engagé avant-même que l’invité ait repris son souffle :

1- le questionner sur un fait, un dérapage ou la saillie de la veille d’une autre personnalité politique. Si cela concerne l’opposition, la réponse sera péremptoire et opportuniste, donc peu crédible. S’il s’agit d’un membre du même clan, la réponse sera évasive voire amphigourique (nouveau vocable à la mode pour embrouillé ), donc peu crédible. C’est exactement le prélude que souhaite l’interviewer pour mettre son hôte en position défensive.

2- Insister sur cet épisode pour gagner du temps sur le sujet pour lequel l’invité a quelque compétence, et sans doute davantage que le questionneur!.

3- Poser une question incluant la réponse, « ne trouvez-vous pas que…», pour montrer que l’on domine l’arène politique ou sociale d’un œil averti et incontournable.

4- S’il reste quelques minutes, attaquer dans le domaine du « prévenu » en prenant bien soin de l’interrompre dès qu’une réponse structurée, plausible et avisée menace d’accrocher le micro…

5- Et enfin, rendre l’antenne dès que le sujet devient audible à l’auditeur pugnace, sous prétexte d’impératif publicitaire!

Quelqu’un peut à juste titre me questionner sur mon côté téléspectateur-auditeur-maso ? J’ai à répondre que quelques bons tribuns** ou énergumène*** me rétribuent de mes frustrations en tenant tête avec brio ou en retournant contre le journaliste le micro qui lui sert de fouet médiatique…

Henri Gizardin

* J’ai des noms !

** J’ai des  noms.

*** J’ai un nom…

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Comments (6)

  • YH Répondre

    J’ai eu l’impression de lire un portrait de JJ Bourdin (BFM TV)

    13 février 2011 à 17 h 04 min
  • françois Répondre

      Bien vu, Monsieur Gizardin! Juste une petite précision: Les points 4 et 5 sont surtout utilisés quand l’interviewé est de droite ( ou plutôt de ce qui en tient lieu)…
      Et dans les cas de duels droite/gauche, le journaliste laisse, dans 80% des cas, l’interviewé de gauche s’exprimer en dernier… ( hors des débats des candidats à l’élection présidentielle entre les deux tours où c’est très codifié).

    12 février 2011 à 23 h 12 min
  • ozone Répondre

    En fait,ce qu’il faut faire,a moins de retourner aux cavernes,c’est de se laisser mouiller par le flot "d’infos" qui vous tombe sur la téte sans y faire vraiment attention,vous allez vous apercevoir que tot ou tard vous tombez sur une vraie info sur les intentions de tel ou tel,ce petit "tilt" rangé dans un coin de votre cerveau va décoder un jour les décisions qui sont prises.
    Un éxemple,peu avant le premier tour en 2002,dans un débat télé,l’alors directeur de campagne de Chirac,Sarkozy a laché quelque chose comme "nous allons déplafonner la durée du temps de travail et payer les heures sups en heures normales",que l’on soit ou pas d’accord,c’est une vraie info sur les intentions ultimes.
    Du recul,voilà le secret et surtout tenter de se faire une idée sur les personnes et vérifier si les développements postérieurs confirment la premiére impréssion,comme le recalage d’une route dans une navigation.
    Alors laissez les parler si cela les calme,il en sortira toujours quelque chose.

    Le distingo entre info" public "et les autres est totalement déplacé,c’est une roue du méme carrosse

    12 février 2011 à 14 h 44 min
  • NL Répondre

    Mécanisme bien rodé et d’une efficacité redoutable. Un des aspects de la lobotomisation des masses par les masses….médiats.

    75 % de gens qui s’en foute, transformés en consommateurs infantilisés, cela suffit à nos élites sans patrie à diriger cette masse informe de petits oiseaux qui font pioupiou en réclamant la becquet si elle ne vient pas assez vite. (Ils appellent çà se révolter….!)

    12 février 2011 à 1 h 31 min
  • Anonyme Répondre

    J’ai remarqué pour ma part qu’il est très facile, en quelques secondes, à la radio, ou à la télévision, de reconnaitre un débat public français, par opposition à d’autres membres de la francophonie, et en complète différence avec les débats anglosaxons (pour ne citer qu’eux):

    Les différents acteurs français du débat se coupent allègrement la parole et s’autorisent à parler en même temps pendant des durées ridicules, incompatibles avec un débat audible. Ceci est une marque affichée de mépris, grotesque, impardonnable, pour l’audience comme pour l’opinion adverse.

    Une règle d’OR devrait être adoptée par tout débateur acceptant de participer à une discussion médiatisée de quelque nature qu’elle soit:

    Exiger avant le début la présence d’un modérateur.

    Exiger le même nombre de secondes de parole que les autres débateurs. Chaque micro pourrait même être doté d’une minuterie électronique cumulative. Le premier débateur qui aura atteint son quota verra son micro automatiquement coupé par la minuterie.

    Exiger que quiconque lui couperait la parole soit neutralisé immédiatement et définitivement (par coupure de son micro, ou par expulsion immédiate des débats du coupable).

    Prévenir qu’au cas où le coupeur de parole ne serait pas exclu, celui qui s’est vu coupé intempestivement quittera les lieux sur le champ, ne parlera plus et ne reviendra jamais à ce type d’émission.

    11 février 2011 à 18 h 07 min
  • mezeray Répondre

    FAITES COMME MOI – PAS DE TELEVISION À LA MAISON.

    11 février 2011 à 17 h 01 min

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