Modalités et suites de la fin de l’euro

Modalités et suites de la fin de l’euro

L’euro ne pourra pas durer, de plus en plus nombreux sont ceux qui le pressentent.

Nombreux aussi ceux qui tentent d’imaginer la suite. Mais deux séries de facteurs échappent souvent à ces réflexions : les modalités concrètes, sous-estimées, et les conséquences, exagérées.

Sur les modalités concrètes, on relève rarement qu’aucun traité, même celui de Maastricht, ne prévoit de « sortie » de l’euro. Conséquence logique de l’affirmation imprudente que cette monnaie nouvelle était irréversible… Mais on peut toujours renégocier.

En revanche, à moins de se mettre hors la loi et en conflit avec l’Europe entière, on ne peut le faire qu’avec tous les membres. Sinon, le sortant garderait ses obligations à l’égard des autres, et n’aurait plus voix au chapitre pour en négocier les conditions d’application. La principale né­gociation sera celle des taux de change de cette monnaie nationale avec les 16 autres, pour limiter les pertes des créanciers. Un tel accord à 17 ne s’obtient pas en huit jours.

Ensuite, concrètement, le sortant devra distinguer sa monnaie nouvelle des autres. S’agissant des comptes, aucun changement (sauf pour les comptes entre pays, si la conversion n’a pas été faite). En outre, il devra y avoir, comme d’habitude, échange des billets et des pièces. Contrairement à ce qu’on lit souvent, bien organisé, c’est rapide : pour l’euro, environ 10 jours.

Last but not least, les préparatoires devront être d’une discrétion absolue pour éviter la spéculation.

Sur les conséquences, ensuite, dont les données paraissent en partie échapper à nombre de commentateurs.

Un principe, valable de tout temps, veut que les engagements financiers d’un pays à l’égard des autres se soldent dans sa monnaie. De nouvelles parités s’imposent aux deux parties. Si l’engagement est libellé dans la sienne, il est à l’abri des variations de change, mais il les supporte dans le cas inverse. De là, découlent deux conséquences.

À l’intérieur du pays, rien ne change, comme cela s’est passé au moment de l’introduction de l’euro (à part l’application du taux de conversion, en France 6,55957). L’incidence instantanée réelle sur prix, salaires, charges sociales, impôts et taxes, soldes de comptes bancaires et d’épargne, etc. est nulle. Donc, pas de panique.

À moyen terme, les prix intérieurs des produits d’importation monteront (si dévaluation) ou baisseront (si revalorisation). C’est ce qu’on a toujours vu lors des réajustements monétaires. Cette incidence sera, cette fois, évidemment plus forte, puisque ces réajustements ont été bloqués depuis 1998. En revanche, s’il y a forte hausse des prix à l’import, il y aura forte baisse à l’export. La demande étrangère augmentera, donc les commandes et, par suite, les embauches et les investissements.

Il en résultera une hausse de la masse salariale et des rentrées fiscales, une baisse des indemnités de chômage, un rééquilibrage du commerce extérieur, une modernisation progressive de l’équipement industriel, et une baisse des besoins d’endettement. Ce sont les bases de la croissance de la production et du pouvoir d’achat.

Comme d’habitude, lorsque, dans une dynamique, on change un paramètre important, tous les autres en sont influencés.

Il est donc imprudent et naïf de raisonner comme s’ils devaient rester stables.

On a raisonné ainsi avec l’euro : on a bloqué les parités sans s’inquiéter du reste, et au bout de 10 ans, on a bloqué l’économie…

S’agissant des dettes et créances sur l’étranger, ces montants se modifieront en fonction des nouveaux taux de change. L’incidence globale dépendra des situations nettes de chaque pays, gardant à l’esprit que les créances des uns sont les dettes des autres. Il y aura des contrats gagnants et des contrats perdants. Dans le cas de la Grèce, les créanciers devront abandonner l’essentiel de leurs créances, accordées d’ailleurs dans l’intérêt de l’UE, et non de la Grèce. Cela ne changera rien : aujourd’hui, elle ne paie qu’avec des fonds européens perdus d’avance.

Ainsi, d’une part, on sous-estime les modalités, qui doivent prendre en compte de sérieuses contraintes ; d’autre part, les prédictions apocalyptiques souvent lues sont davantage fondées sur la peur de l’inconnu que sur un examen réfléchi. Or, la peur est mauvaise conseillère…

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Comments (2)

  • goufio Répondre

    Le Traité de Lisbonne a dans son article 50 introduit la procédure de retrait d’un Etat membre, se rendre sur :http://translate.google.fr/translate?hl=fr&langpair=en%7Cfr&u=http://www.lisbon-treaty.org/wcm/the-lisbon-treaty/treaty-on-european-union-and-comments/title-6-final-provisions/137-article-50.html&ei=luf8UOvhMKWa1AWayIDYDA

    L’article 50,

    1. Tout État membre peut décider de se retirer de l’Union, conformément à ses règles constitutionnelles.

    2. Un État membre qui décide de se retirer notifie au Conseil européen de son intention. A la lumière des orientations fournies par le Conseil européen, l’Union négocie et conclut un accord avec l’État, fixant les modalités de son retrait, en tenant compte du cadre de ses relations futures avec l’Union. Cet accord est négocié conformément à l’article 218 (3) du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Il est conclu au nom de l’Union par le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, après approbation du Parlement européen.

    3. Les traités cessent d’être applicables à l’État concerné à partir de la date d’entrée en vigueur de l’accord de retrait ou, à défaut, deux ans après la notification visée au paragraphe 2, sauf si le Conseil européen, en accord avec l’État membre concerné , décide à l’unanimité de proroger ce délai.

    4. Aux fins des paragraphes 2 et 3, le membre du Conseil européen ou du Conseil représentant l’État membre qui se retire ne participe pas aux discussions du Conseil européen ou du Conseil ou dans les décisions qui le concernent.

    La majorité qualifiée se définit conformément à l’article 238 (3) (b) du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

    5. Si l’État qui s’est retiré de l’Union demande à adhérer à nouveau, sa demande est soumise à la procédure visée à l’article 49.

    21 janvier 2013 à 8 h 14 min
  • JEAN PN Répondre

    Plus mal où nous en sommes, nous ne risquons rien de sortir de l’Euro. Alors allons-y !

    17 janvier 2013 à 9 h 22 min

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