Réflexions sur la nouvelle diplomatie française

Réflexions sur la nouvelle diplomatie française

La politique étrangère plus que toute autre politique procède ou de l’utopie ou du réalisme.

Depuis soixante ans au moins, c’est en France l’utopie qui l’a emporté. Le discours prononcé le 27 août par le président de la République devant les ambassadeurs de France réunis à l’Élysée en apporte une preuve supplémentaire.

Il est vrai cependant que « la nouvelle diplomatie française », comme titre la presse, comporte un aspect positif, celui de rompre avec l’anti-américanisme qui sévissait depuis De Gaulle et qu’avait renforcé Chirac au point de faire de la France le porte-parole de tous les anti-américains de la planète, cette animosité contre Washington allant de pair avec une grande complaisance pour l’Union soviétique hier, la Russie aujourd’hui, mais le personnel est le même.

Cette amitié pour Moscou était d’autant plus regrettable que la Russie a toujours trahi les intérêts français : le retournement de Brest Litovsk en 1917 pendant la Première Guerre mondiale, le Traité de coopération avec l’Allemagne hitlérienne à la veille de la Deuxième Guerre mondiale, l’aide considérable, notamment en armements, fournis à ceux qui combattaient la France en Indochine puis en Algérie – l’URSS ayant ainsi fait tuer de nombreux militaires français – et aujourd’hui, la campagne contre le candidat de la France au FMI.

Mais l’utopie socialo-communiste a été la plus forte, renforcée par le coefficient personnel de chefs d’État qui n’étaient pas communistes mais qui soignaient leur complexe d’infériorité envers les États-Unis et leurs présidents par une compensation de complaisance servile à l’égard de Moscou. Avec Sarkozy, c’est fini et l’on ne peut que s’en féliciter. En revanche, on ne peut qu’être consterné par la persistance de l’utopie diplomatique dans d’autres importants domaines. J’en donne ci-après trois cas inquiétants.

1) Transformer le G8 en G13 en y incluant des puissances émergentes ne ferait que diluer dans un ensemble hétéroclite la puissance occidentale, au cours de palabres sans fin.
2) Faire de l’Afrique une « priorité essentielle » (sic), c’est traiter avec le chaos et maintenir le pacte de corruption qui lie depuis longtemps certains dirigeants français avec certains potentats africains riches en pétrole, en échange d’une « aide au développement » qui se retrouve souvent dans les banques offshore faisant la fortune de roitelets africains.
3) Le cas turc, lui, est particulièrement significatif au moment où un islamiste arrive à la tête de ce qui fut autrefois l’Empire ottoman.
Pendant sa campagne électorale, Nicolas Sarkozy avait proclamé qu’il était résolument contre l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne car, disait-il, avec raison, la Turquie est en Asie. C’était rentable de le dire, l’opinion étant majoritairement contre l’adhésion d’Ankara à l’UE. Mais une fois élu, on change d’avis en se réfugiant dans l’ambiguïté et en omettant soigneusement de faire savoir que la volonté d’adhésion de la Turquie à l’UE n’est pas du tout motivée par l’amour de l’Occident chrétien, mais tout simplement par la perspective de subventions qui pourraient être énormes compte-tenu de l’arriération du monde rural turc.
Et par la possibilité d’une émigration massive en Europe. Valéry Giscard d’Estaing voit juste en disant : « si la Turquie entre en Europe, c’est la fin de l’Europe » (cf. mon article sur la Turquie dans « Les 4 Vérités » n° 477 – janvier 2005).

En conclusion, je rappellerai qu’en stratégie, la première question que l’on se pose est celle-ci : « d’où vient la menace ? ». Aujourd’hui, pour l’Occident, la menace, c’est l’islam. Alors, en lieu et place d’une « Union méditerranéenne », vague et dangereuse, il serait plus judicieux, me semble-t-il, de parler de « mobilisation » contre ladite menace qui est à nos portes et même déjà à l’intérieur de nos murs.

Christian Lambert
Ancien ambassadeur de France

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Comments (2)

  • Anonyme Répondre

    La diplomatie Française est-elle encore crédible quand notre pays s’enfonce dans la dette, dans le capharnaum et dans la mouise parce que les Français ne veulent pas se moderniser, évoluer dans leur mentalité et se mettre au boulot au lieu de se plaindre sans cesse la bouche pleine ?

    Est-celle encore crédible quand on est connu pour la ramener sans cesse quand on nous demande rien et donner des leçons à tout le monde de façon condescendante alors que nous ne sommes même pas capables de les appliquer à nous-mêmes ?

    La diplomatie Française est-elle encore crédible alors que nous sommes les rois de la réunionite, des palabres interminables, des débats stériles, des discussions sur le sexe des anges, des cheveux coupés en 6, et que l’on nous perçoit plus que comme une montagne qui accouche de souris ?

    10 septembre 2007 à 17 h 40 min
  • Gérard Pierre Répondre

       Je suis heureux de trouver ici, sous la plume d’un ancien ambassadeur, des vérités enfin proclamées.

       Notre servilité vis-à-vis du monde socialo-marxiste remonte à avant-guerre. Souvenons nous de ces " intellectuels " qui, aprés quelques journées de tourisme organisé par la camarilla de monsieur Staline s’en revenaient nous chanter les louanges d’un paradis social qu’ils venaient de découvrir avec un émerveillement confinant à la presbytie politique la plus consternante. Cela nous a valu par la suite l’immonde Thorez et l’actuel statut de la fonction publique qui fit dire et écrire à Maurice Druon, parlant du dictateur sanguinaire de Moscou : LA FRANCE AUX ORDRES D’UN CADAVRE.

       La France fut tout de même libérée par des gamins du Maryland, de l’Arizona, du Névada et de bien d’autres contrées d’Amérique du Nord, ……. et non par l’armée rouge et ses affidés locaux.

       Notre obsession en direction de l’Afrique relève aussi d’une certaine forme de tropisme mental. Nous avons créé et enrichi plus de potentats dans cette région du monde que de milliardaires dans notre propre pays. Mais voila, quelqun aurait aperçu là-bas un ou plusieurs chinois résolus à nous y supplanter, ……… forçons donc encore le trait !

       Si monsieur l’ambassadeur me le permet, j’aimerais mettre en évidence une autre constante de notre politique étrangère remontant à l’affaire du canal de Suez, à savoir notre abandon d’Israël à son propre sort. Vous me direz sans doute que c’est là une retombée cohérente de notre anti américanisme et de notre politique pro arabe. Mais cette conséquence, me semble-t-il, mérite aujourd’hui d’être bien mise en évidence.

       Alors monsieur le président Sarkozy, il est peut-être encore tôt pour faire un bilan, néanmoins, sur le plan de la politique étrangère, en matière de rupture vous méritez pour le moment l’appréciation : PEUT MIEUX FAIRE !

       ………………………. to be continued !

    10 septembre 2007 à 16 h 34 min

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